➡ Vu au cinéma Cinescope de Louvain-La-Neuve - Sortie du film le 20 juin 2018

Signe(s) particulier(s) :

• le réalisateur Michael Pearce a grandi sur l’île anglo-normande de Jersey, voisine de Guernesey, et souhaitait y réaliser son premier film, avec ses paysages spectaculaires et sauvages, ce qui fut ici le cas pour les scènes extérieures ;
• histoire inspirée de celle de la « Bête de Jersey », redoutable violeur d’enfants ayant sévi pendant dix ans dans les années soixante ;
• l’actrice principale irlandaise, Jessie Buckley, est aussi une étoile montante de la chanson dans son pays, tandis que le britannique Johnny Flynn, qui partage l’affiche avec elle, est également chanteur, mais aussi auteur et musicien.

Résumé : Sur l’île de Jersey, une jeune femme tombe amoureuse d’un homme mystérieux. Cette rencontre la pousse à fuir sa famille tyrannique. Alors que l’homme est soupçonné de plusieurs meurtres, elle le défend aveuglément.

La critique

Tout commence par la fête d’anniversaire de Moll Huntington, une fille de bonne famille réservée, à la chevelure rousse étincelante. Sauf que Moll, après avoir été responsable il y a quelques années d’un accident à l’école, vit dorénavant sous les règles d’une mère tyrannique, à s’occuper de son père malade, tandis que son frère et sa sœur semblent privilégiés, et davantage appréciés. Alors qu’elle était autrefois la tête de Turc à l’école, Moll continue de s’effacer continuellement, sa mère ne cessant de plus de la faire culpabiliser dès qu’elle se permet une échappatoire...

Jusqu’au jour où elle rencontre Pascal, un mystérieux blond au physique négligé, et au passé trouble, dont elle va tomber amoureuse, et inversement. Très vite, Pascal sera pourtant le suspect numéro un d’une série de meurtres de jeunes filles sur l’île. Commence alors une histoire d’amour pointée du doigt, au sein de laquelle règne des sentiments aussi passionnés que dangereux...

En plus de nous immerger au cœur d’un étrange couple où les deux protagonistes ne sont pas innocents de leur passé, même s’ils ont payé le prix, Michael Pearce instaure à son film un climat des plus anxiogènes, lui qui permet dès lors à son film de glisser du côté du thriller. Les décors filmés sur l’île de Jersey, accouplés d’une musique angoissante et d’une photographie assez sombre permettent de créer une menace constante tout au long de cette histoire paranoïaque, où se mêlent la victimisation et le doute persistant.

Dans « Jersey Affair », le réalisateur ne livre jamais les clefs évidentes d’un dénouement lambda, mais préfère jouer la carte de la bestialité qui sommeille en chacun de nous, et cela jusqu’à la dernière minute, quitte à renverser nos attentes. Percutant et psychologique, ce film questionne aussi la frontière étroite entre la rédemption et les erreurs passées, et les préjugés infondés qui en découlent, tout comme de la différence.

Tout en ne livrant pas toutes sur réponses sur les questions qu’il a ouvertes, « Jersey Affair » est un tour de passe tourmenté, porté par deux acteurs intenses qui portent en eux une signature énigmatique et ambiguë très intéressante, et allant de pair avec leurs rôles, incontrôlables. En tout cas, vous ressortirez très certainement estomaqué de ce premier film, mis en scène avec savoir-faire déjà indéniable... - 14/20