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CINECURE
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Juho Kuosmanen
Olli Mäki (Hymyilevä mies/The Happiest Day in the Life of Olli Mäki)
Sortie le 11 janvier 2017
Article mis en ligne le 3 décembre 2016

par Charles De Clercq

Synopsis : Été 1962, Olli Mäki prétend au titre de champion du monde poids plume de boxe. De la campagne finlandaise aux lumières d’Helsinki, on lui prédit un avenir radieux. Pour cela, il ne lui reste plus qu’à perdre du poids et à se concentrer. Mais il y a un problème - Olli est tombé amoureux de Raija.

Acteurs : Jarkko Lahti, Oona Airola, Eero Milonoff


Primé lors des des 29e European Film Awards 2016


Pour son premier long-métrage, le réalisateur Juho Kuosmanen offre un film de toute beauté, se permettant de tourner en noir et blanc sur toute la durée du film et qui plus est avec une pellicule 16 mm qui permet de proposer une image avec un grain qui rappelle les riches heures du cinéma et de la photographie. Il nous propose une histoire d’un boxeur mondialement connu... dans son pays. On comprendra cette allusion à « mondialement » lorsque l’on apprendra que ce « boulanger de Kokolla » a concouru en 1962 à Helsinki pour le titre de champion du monde contre l’américain Davey Moore. Match qu’il perdit lamentablement au deuxième round. C’est l’histoire d’Olli Mäki, né en 1936, considéré comme un héros national par certains ou plutôt comme un « héros de la classe populaire », et aujourd’hui condamné par la maladie d’Alzheimer à ne pas prendre véritablement conscience du film qui lui est consacré. Serait-ce un horrible spoiler que de donner dès le début de la critique le résultat du match ? Certainement pas, ou en tout cas, si peu ! C’est que Olli Mäki n’et pas un film de boxe, consacré à la boxe comme Southpaw (La rage au ventre) ou Creed : L’Héritage de Rocky Balboa ! C’est un film de boxeur ou la boxe est seconde, quasiment secondaire.

Le film nous raconte l’histoire de cet homme, embarqué presque malgré lui dans une aventure et un (des) combat(s) qui le dépassent. Certes le combat contre l’Afro-Américain qui se dessine à l’horizon et qui exigera du finlandais de gérer son poids pour passer sous les 57 kilos. Mais c’est aussi un autre combat, celui de l’amour ! Il est amoureux de Raija (Oona Airola, dans son premier long métrage) ! Un couple amoureux qui est sans histoire, qui ne ferait pas les pages des magazines de mode ou glamour. Un homme et une femme ordinaires. Ils s’aiment, tout simplement. Et cette femme, elle met Olli Mäki KO debout, si l’on peut se permettre. Mais, même en 1962, l’amour et le sport ne font pas bon ménage. Outre qu’il faut que le champion que l’on prépare doit avoir l’esprit libre de toute entrave. Il faut aussi qu’il joue (déjà à l’époque) le jeu de la médiatisation et des sponsors. C’est tout l’enjeu du film, cet amoureux, pris dans les mailles d’un projet qui le dépasse. Le réalisateur a eu l’idée de réaliser ce film lorsqu’il a appris l’histoire de l’achat d’une bague le jour du match (ce que vous découvrirez et comprendrez à l’écran).

Le film doit beaucoup à son interprète principal, Jarkko Lahti. Il habite vraiment ce rôle et l’on oubliera assez vite qu’il a douze ans de plus que son personnage et plus de 60 kilos probablement. C’est que l’acteur avait fait un peu de boxe en amateur et s’y est remis ensuite lorsqu’il a été pressenti pour le film il y a quelques années. Il vient essentiellement du théâtre (et des séries télévisées) mais c’est ici son véritable premier grand rôle. Enfin, il y a aussi un autre protagoniste, parfois antagoniste, Eero Milonoff dans le rôle d’Elis Ask, l’entraîneur personnel d’Olli Mäki. Il pousse son boxeur dans les cordes, tente de lui faire comprendre qu’une histoire d’amour serait désastreuse pour sa carrière. Ce n’est pas vraiment un film de boxe, mais, pour le réalisateur c’est un film basé sur les personnages. On a commencé par développer la mise en scène avec les acteurs et ensuite on a réfléchi aux raisons et aux possibilités de déplacements de caméra, au fait de changer quelque chose si nécessaire. On a tourné les scènes en utilisant de longues prises, du début à la fin et un peu au-delà, et on a fait ça plusieurs fois avec différents objectifs. En général, on ne fait pas de retakes. Et on ne se soucie pas trop des erreurs, c’est essentiel de ne pas travailler dans la peur des erreurs, sinon on finit par prendre des décisions ennuyeuses. Je ne donne pas de directions fortes aux acteurs, il s’agit plutôt d’avoir une ambiance sur le plateau qui aille dans la bonne direction. En relâchant un peu le contrôle, on obtient des détails et des surprises intéressants et ça aide à garder la scène vivante.


Note d’intention de Juho Kuosmanen (cliquer pour lire)

Ensuite, quand j’ai commencé à creuser davantage l’histoire d’Olli, j’ai réalisé qu’elle était pleine de détails magnifiques et de complexité, ce qui la faisait sortir de l’ordinaire et la rendait unique. L’art est dans les détails, dit-on. Assez vite, j’ai compris que l’histoire d’Olli ne parlait pas seulement de perdre un combat et de gagner l’amour. En fait, il ne s’agissait ni de gagner ni de perdre, mais de trouver son propre chemin vers le bonheur indépendamment des attentes extérieures.

En un sens, le combat, et la participation d’Olli, était un choc entre deux visions du monde - un communiste d’une petite ville finlandaise sous pression pour devenir une star dans la machine du show-business américain. Dans les jours qui ont précédé le combat, Olli a compris que “la définition de quelqu’un d’autre ne peut pas mesurer l’état de mon âme”, comme a magnifiquement dit Malvina Reynolds. Il a pris sa décision avant que le combat ait lieu et il a choisi le monde où les gens se caressent au lieu de se tabasser. Olli Mäki a dit qu’il n’avait jamais aimé le monde de la boxe professionnelle et je crois que le jour où il a perdu le combat pour le championnat, il a compris qu’il pouvait vivre sa vie sur la base de ses propres priorités et non selon les attentes de quelqu’un d’autre. Et c’est notre histoire, l’essence de la quête spirituelle de notre protagoniste.

(extrait du dossier presse)


Côté anecdotique, on ne manquera pas la scène du « tabouret » ou l’une ou l’autre de « détente » où il s’agit de lancer des balles, comme dans une foire, pour faire tomber des femmes dénudées dans un bassin d’eau ! Est-elle froide ou pas ? Quand on voit dans une scène le futur champion passer du sana à un lac glacé, on se dit que la température est de peu d’importance pour un(e) finlandais(e). Cependant, sur ce coup, de voir ces hommes (et femmes) s’ébaudir de l’humiliation de femmes est choquant. En revanche, la scène des vestiaires où l’on se jette de l’eau au jet ou au seau témoigne d’un rapport décomplexé au corps et à la nudité. Certes, c’était il y plus de cinquante ans et c’est une culture du Nord. N’empêche que cela fait penser aux vestiaires d’aujourd’hui où certaines cultures religieuses imposent une pudeur qui n’y est pas de mise ! A noter enfin une petite curiosité dans le sous-titrage à cause d’un « faux-ami ». Le mot finnois kamera est traduit dans les sous-titres français en caméra, alors qu’il signifie « appareil photographique » en français (en néerlandais, le sous-titrage « camera » convient bien sûr).

Bande-annonce :

Olli Mäki
Été 1962, Olli Mäki prétend au titre de champion du monde poids plume de boxe.
De la campagne finlandaise aux lumières d’Helsinki, on lui...
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